jeudi 11 août 2016

Hermès, 24 Faubourg (Vintage). Solaire bourgeois




(English readers : due to a breach in the fabric of the universe, I'm not currently translating my posts. Google is there for you though)

Créé par Maurice Roucel en 1995, 24 Faubourg dépareille grandement parmi les floraux aquatiques maigrichons qui régnaient sur le marché à l'époque. Au lieu d'une ennuyeuse overdose de calone et de muscs blancs, j'ai eu le plaisir de découvrir un bouquet de fleurs blanches classieuses arrosées de galbanum, de jacinthe et de muguet. 
N.B. : ma version est une vieille miniature dénichée lors d'un vide-grenier. Les notes de tête sont donc quasiment absentes.

Dans ce minuscule flacon que j'ose à peine ouvrir, le liquide est épaissi et d'un orange relativement sombre. 


Le parfum lui-même s'ouvre sur une fleur d'oranger narcotique et liquoreuse, plus dans les lignes de Boucheron Femme plutôt qu'un néroli un peu gourmand. Cette entrée en matière est marquée par une certaine amertume qui restreint la débauche de la fleur d'oranger. Un galbanum vert et rigide soutient l'ensemble. La note de jacinthe est encore bien présente malgré les années passées, un peu cireuse et poudrée, une touche appréciable pour nuancer la fleur d'oranger. 
Malgré le grand âge de ma miniature, une note distincte de muguet est encore perceptible, et donne à 24 Faubourg ce côté joliment désuet qui fait la patte de la maison Hermès.
Cette ouverture un peu corrompue par l'âge apparaît comme une distillation presque ratée, trop liquoreuse de fleurs inassorties. Étrangement baroque et bizarre, les premières heures de 24 Faubourg sont tiraillées entre une amertume de fleurs vertes écrasées et la richesse d'une fleur d'oranger qui dépasse en somptuosité la plupart des autres interprétations de la note.


Une fois que les contradictions des notes de cœur s'apaisent, le fond émerge dans toute sa fierté hors du temps, décuplé par son séjour prolongé dans une boîte à chaussure en plein soleil d'août sur le parking d'un supermarché (je n'exagère même pas).
Danaé, Alexandre-Jacques Chantron, 1891.
Ce fond donc, qui règne en maître pendant quasiment huit heures (parce que vintage), donne toute sa dignité à 24 Faubourg, en le sauvant du registre estival traditionnel du parfum solaire. Le gardénia des versions modernes est pratiquement absent de ma miniature. Seuls le jasmin indolique et l'iris persiste, avec un accord poudré et gracieux de vanille (discrète), de cèdre et de santal. Les dernières heures voient percer délicatement un ambre un peu conventionnel, mais heureusement rattrapé par une touche de civette un peu cuirée et de patchouli bien sec. Le fond de 24 Faubourg est gracieusement boisé, crémeux et poudré (beaucoup d'iris), là où les notes de cœur et de tête, laissées à elles-mêmes, auraient pu frôler l’écœurement.

***

24 Faubourg, un solaire bourgeois ? Oui, définitivement. Si ma version est bien plus sensuelle et intéressante que la moderne, elle reste maintenue fermement par une colonne vertébrale bien rigide de galbanum et de bois secs, alors que les fleurs affichent la richesse cireuse de leurs pétales sans jamais laisser les notes animales prendre le dessus. Une leçon en richesse et en restreinte, où un parfum somptueux pour le rester sans sacrifier sa digne retenue.


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